L’équipe de la Startup d’État e.contrôle a essayé d’améliorer ses rituels de sprint. Ses membres vous expliquent les difficultés rencontrées et surtout les solutions adoptées.
Tu sors d’une réunion de lancement de sprint. Tu es émotionnellement vidé·e. Ça a duré 2h30, tout le monde a donné son avis, personne n’était vraiment d’accord, les deux premiers sujets ont pris tellement de temps que les suivants ont été bâclés, et à la fin tu n’es même pas vraiment sûr·e que les objectifs choisis soient pertinents.
Inéluctable, la douleur du lancement de sprint ? Non !
Sans prétendre avoir atteint la perfection, nous te proposons une petite visite touristique de nos rituels, en espérant que tu puisses y piocher quelques idées pour aider ton équipe. Ce qui fonctionne pour nous ne fonctionne pas forcément pour ton equipe ! À toi d’essayer et de l’adapter.
Un sprint n’est jamais une course solitaire épuisante. C’est un travail d’équipe visant à faire mieux en vivant mieux.
Nos expériences professionnelles précédentes suivant “la méthode projet” (accompagnée de planification fine et de rétroplanning) n’ont jamais été concluantes. Elles nous entraînaient trop souvent dans des tunnels, les délais n’étaient jamais respectés et pire que tout, il nous arrivait de privilégier l’atteinte des délais à la qualité de notre travail… sans atteindre ni l’une ni l’autre. Ça semblait ne déranger (presque) personne car c’était un peu la faute de tout le monde, donc de personne. Les seuls à qui ça pouvait vraiment poser problème ce sont peut-être les bénéficiaires directs de ces projets. Ils étaient trop souvent éloignés ou mal représentés. En effet les membres des divers comités et autres groupes de travail “stratégiques”, bien que de bonne volonté, étaient rarement les destinataires des projets que nous pilotions.
Pour autant, beaucoup d’administrations et d’entreprises travaillent de cette façon et la terre ne s’est pas arrêtée de tourner ! Néanmoins, pour nous, ce n’est pas satisfaisant.
À l’inverse, nous avons observé des équipes avec des méthodes de travail modernes, censées être agiles, qui débordaient de contraintes et de rituels pour des raisons pas très claires.
Nous préférons prévenir que nous ne sommes pas certifiés “SCRUM Machin”, nous n’avons pas acheté de bouquins sur “KANBAN V15.2”, nous n’écoutons pas des podcasts de supers coachs Agile de la Silicon Valley… On a juste essayé des méthodes basiques de façon assez artisanale sur les bons conseils de notre coach, Julien Dauphant.
Plus que le suivi strict d’une méthodologie “Agile” ou “Scrum”, nous essayons de respecter les principes associés que nous pourrions résumer comme ceci :
Cette image illustre la façon dont nous travaillons. Source : Marina Fedoseenko
Quant au jargon de la “startup nation”, nous en avons adopté certains éléments qui nous ont paru utiles. Chaque secteur d’activité a ses tics de langage. Voici les nôtres et leurs traductions :
En pratique, nous avançons par itérations successives de deux semaines, au lieu de suivre un plan détaillé “des choses à réaliser” à six mois. Nous avons choisi d’adopter et de ritualiser ces trois types de réunions d’équipe :
Pendant plusieurs mois, l’équipe rencontrait des difficultés pour ses réunions de lancement de sprint :
On en est sorti avec un ressenti partagé sur le fait qu’on aimait pas ce rituel et qu’il fallait essayer autre chose. Avec l’aide de notre coach, on a fini par faire une rétrospective uniquement sur ce thème : nos rituels de sprint. Julien Dauphant (notre coach) a posé des concepts de base. Puis l’équipe a fait des itérations de ses rituels. Nous solicitions l’aide du coach de temps en temps.
On a tenté d’introduire un peu de “silence”, au sens propre du terme, dans ce rituel :
Depuis, ça roule tout seul (enfin presque !). Il nous est même arrivé de passer sous la barre des 50 minutes !
Avant de débuter l’atelier, deux membres de l’équipe doivent se désigner pour jouer respectivement les rôles d’animateur et de maître du temps.
L’animateur :
Le maître du temps :
Les personnes assumant ces rôles prennent également part à toutes les étapes avec les mêmes droits que les autres membres de l’équipe.
Chaque membre de l’équipe écrit dans le doc, en silence, deux objectifs mesurables pour le sprint à venir. Il les renseigne dans la ligne le concernant.
Chacun est libre de ne pas proposer d’objectifs ou de n’en proposer qu’un seul. En revanche, il n’est pas possible d’en écrire plus de deux.
Il est fréquent de retrouver des objectifs similaires entre plusieurs personnes.
L’animateur copie-colle les objectifs de la partie 1 dans la partie 2, sans les noms des personnes. Si deux personnes ont indiqué un objectif identique ou assez proche, l’animateur ne l’indiquera qu’une seule fois.
Exemples :
Ensuite, chaque membre de l’équipe peut commenter les objectifs, en écrivant dans le doc, en silence.
Les commentaires peuvent être des éclairages, des compléments d’information, des questions, des alertes, des ressentis, des propositions, des commentaires à des commentaires…
Il est donc possible de répondre à l’écrit aux commentaires d’un autre. Il n’est pas nécessaire de savoir qui a écrit quoi. Le mode “suggestion” de votre éditeur de texte collaboratif n’est donc pas nécessaire.
Exemples :
Disposer en PROD de la fonctionnalité permettant de procrastiner
Regarder le MOOC de bêta.gouv en accéléré x2
C’est pas trop rapide ?
En vrai, c’est mieux d’aller discuter directement avec la communauté
L’animateur lit les objectifs et les commentaires, les uns après les autres. Chacun peut demander des précisions à l’oral si les commentaires ne sont pas suffisants. L’objectif est de s’assurer que tout le monde a compris chaque objectif et de vérifier qu’ils sont mesurables. Ce n’est pas un temps de débat mais seulement d’écoute.
Chaque membre de l’équipe dispose de deux émoticônes (celles qui le représentent) pour indiquer quels objectifs sont les plus prioritaires d’après lui/elle.
Il/elle peut mettre une émoticône sur deux objectifs différents ou deux émoticônes sur le même objectif.
Exemples :
🥇-🏓🏓🦀Disposer en PROD de la fonctionnalité permettant de procrastiner
- C’est une super idée
- Mais il faudra prévoir un openlab
🥈-🦀Regarder le MOOC de bêta.gouv en accéléré x2
- C’est pas trop rapide ?
- Non, ça peut se faire
- En vrai, c’est mieux d’aller discuter directement avec la communauté
L’animateur demande aux membres de l’équipe de voter pour répondre à la question :“Pensez-vous que nous réussirons à atteindre ces objectifs en deux semaines ?”
On vote de 1 à 5 : 1 = “pas moyen”, 5 = ”fastoche”.
On compte jusqu’à 3 et chacun vote en utilisant sa main : de un à cinq doigts levés.
Si l’un ou plusieurs membres proposent un vote de trois doigts ou moins, ils sont invités à expliquer pourquoi et à proposer des modifications dans les objectifs proposés pour que leur vote atteigne 4 ou 5.
On peut par exemple supprimer un objectif, ou n’en faire qu’un morceau (exemple : mettre en prod c’est trop ambitieux, mais on peut déjà finaliser le design).
Il ne reste plus, pour l’animateur, qu’à mettre à jour le trello du sprint avec ces nouveaux objectifs. Chaque membre de l’équipe pourra ajouter ses tâches.