Après 20 heures de phoning utilisateurs, 2h37 pour votre première pull request, 1 Open Lab, 12 569 lignes de code, et 5 interlocuteurs dubitatifs quand vous leur avez parlé de service numérique : bravo vous arrivez au bout de vos 6 premiers mois en tant qu’intrapreneur·e !
Il y a 6 mois, vous avez convaincu un comité décisionnel de vous faire confiance, pour apporter un premier niveau de réponse à un irritant rencontré par des professionnels (de l’administration ou non), ou des citoyens.
Depuis, vous êtes devenu expert·e ès pitch capable de vous produire devant tous les publics en 1, 3 ou 10 minutes.
C’est désormais l’heure du premier bilan. À la Fabrique Numérique, incubateur des Ministères de la transition écologique et solidaire et de la Cohésion des territoires, cette rencontre prend la forme d’un board. Objectif ? Décider ensemble des suites à donner en fonction de l’avancement du produit, des premiers résultats, et bien sûr de votre volonté de poursuivre le service numérique !
À la Fabrique Numérique, le board réunit :
- la Secrétaire Générale qui a doté l’intrapreneur·e sur ses 6 premiers mois du support nécessaire (matériel, locaux, coaching),
- le(la) Directeur·ice Général·e qui l’a libéré·e d’une partie de son temps au service de son produit et prendra en charge le cas échéant les suites à donner : poursuite de l’investissement, accélération du développement avec des moyens supplémentaires en temps et/ou un renforcement de l’équipe, ou arrêt du service numérique.
- L’équipe produit (développeur·se, coach, intrapreneur·se),
- Un ou deux représentants d’utilisateurs.
À l’issue de la discussion qui porte sur les résultats, les objectifs et les moyens nécessaires à la réussite, le board décide parmi les choix de tout arrêter, de continuer en sortant du mode lean startup, ou d’augmenter l’investissement pour accélérer le développement du service.
Le pitch à 6 mois intervient à un moment où vous et votre équipe êtes focalisés sur la première vraie version de votre service numérique, en ligne depuis un, deux mois voire plus. Cette version beta est perfectible, tant sur le front office (améliorations suite aux premiers retours utilisateurs), que sur le back office trop artisanal à ce stade. Cela vous parle forcément les soirées passées à compiler des données à la main, les documents vérifiés un à un, les bases de données consolidées moyennant quelques centaines de CTRL-C/CTRL-V ! En parallèle vous poursuivez vos échanges avec vos utilisateurs et partenaires, en parfait VRP de votre service numérique.
Face à vous, vos « financeurs » et sponsors à haut niveau. Il faut (1) leur montrer qu’ils ont eu raison de vous faire confiance et (2) leur exprimer clairement vos ambitions, souhaits et besoins pour la suite.
Ce pitch, c’est le vôtre… mais n’hésitez pas à venir accompagné de votre équipe (développeur·e + coach), qui seront une présence rassurante et profiteront également des retours. Surtout, entourez-vous d’un ou plusieurs représentants choisis parmi vos utilisateurs : ils témoigneront de leur intérêt pour le service numérique.
Pour pallier toute défection de dernière minute (urgence personnelle ou professionnelle, problème de transport, défaillance de la visio, etc.), n’hésitez pas documenter la vie de votre produit avec un certain nombre de verbatims ou de courts témoignages vidéos d’utilisateurs, qui pourront être mobilisés en cas de besoin… parole d’intra ;-) !
Pour Aides-territoires, ce sont des agents de services déconcentrés qui ont témoigné : “La plate forme est claire et très compréhensible […] On y voit les différentes aides suivants les différents territoires ce qui est très positif. Pour moi elle est très intéressante autant pour les services de l’Etat que pour les collectivités.”
En 6 mois, vous avez peaufiné LA punchline qui permet à votre interlocuteur de comprendre l’objectif du produit en une phrase : c’est le moment où jamais de déclamer votre proposition de valeur !
“Aides-territoires, faciliter l’accès des collectivités aux meilleures aides publiques pour leurs projets”
Puis, vous présentez le produit et quelques-unes de ses principales fonctionnalités : scénarisez au maximum, inspirez-vous de vos utilisateurs et de leur vécu (pourquoi ils vont utiliser le service numérique, comment ça marche, etc), et tant pis si vous ne montrez pas tout.
Par exemple Aides-territoires permet à un agent de la ville de Cayenne d’identifier en trente secondes les aides portées par près d’une dizaine de porteurs d’aides de la sphère Etat. Sans Aides-territoires, cela lui aurait demandé plusieurs heures de recherches, puis d’analyse.
Expliquez où vous en êtes, valorisez le travail accompli jusqu’ici : n’oubliez pas, le service n’existait pas il y a 6 mois.
Vous êtes désormais capable de documenter votre service au moyen de quelques métriques d’impact qui montrent son utilité concrète et réelle.
À 6 mois les métriques sont acquises sur de petits échantillons pas nécessairement représentatifs, mais elles confortent l’intérêt à creuser le service numérique. Les mesures d’impact, quantitatives ou qualitatives sont toujours nécessaires. Elles vous permettent d’objectiver vos ambitions et vos réalisations.
Que vous choisissiez de suivre le comportement de vos utilisateurs, de valoriser nombre de partenaires du service, l’exhaustivité de la base de données, ou de mettre en avant le verbatim bien choisi d’un seul utilisateur satisfait du service, gardez en tête qu’il faut viser l’impact réel.
Attention aux vanity metrics : un nombre de vues sur votre site internet ne sert à rien (sauf si vous venez de l’espace publicitaire). Pas de jargonnage possible : vos mesures d’impact doivent traduire immédiatement et pour tout le monde l’intérêt de votre produit.
La meilleure preuve de votre impact c’est le témoignage de vos utilisateurs : un chef de projet qui a découvert une aide “grâce à vous” dans l’Essonne, des agents de services déconcentrés dont le travail est considérablement facilité par le produit … et qui attendent une montée en puissance du service voire sont prêts à s’engager et vous soutenir.
Enfin, vous présentez vos objectifs (chiffrés !) pour les 6 prochains mois et la manière de les atteindre. Ici aussi, appuyez-vous sur des impacts concrets et mesurables. Ceci facilitera l’écriture de la feuille de route du semestre.
Aides-territoires s’est fixé comme objectif d’acquérir de nouveaux partenaires institutionnels (notamment Ademe, Agences de l’eau, Caisse des dépôts) ou territoriaux (une dizaine de territoires autonomes pour remplir les aides dont 2 Outre-mer).
Soyez clairs et réalistes sur les moyens dont vous avez besoin pour poursuivre à la hauteur de vos ambitions : du temps en plus, un renforcement de l’équipe ponctuel ou de long terme (stagiaire, compétences particulières en matière de développement, UX design, etc), des besoins SI ou matériels, un soutien à haut niveau, etc.
Pour Aides-territoires, c’est le passage à temps plein de l’intrapreneure sur son produit qui a, entre autres, été négocié.
Vous ne devriez pas avoir pas de grande surprise à l’issue de ce board, qui constitue l’aboutissement d’un travail de conviction de vos sponsors de haut niveau sur plusieurs mois. Autrement dit, au-delà de son caractère symbolique, le board est là pour consacrer une décision préparée, anticipée tant sur le montage financier que sur le produit et l’équipe.
À +12 mois, le board sera encore plus exigeant sur les métriques que vous lui présenterez et sur la valeur de votre service numérique, il faut s’y préparer dès maintenant.
Rendez-vous est donc pris au plus tard dans 6 mois !
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